Les compétences essentielles en EM
Poser des questions ouvertes
Une question fermée implique un choix très restreint de réponse : « Voulez-vous arrêter de fumer ? Quand avez-vous pris votre dernier verre ? » etc. À l’inverse, une question ouverte laisse une grande liberté d’élaboration à la personne, l’amène à réfléchir et à s’exprimer : « Comment ce problème affecte-t-il votre vie quotidienne ? Qu’envisagez-vous pour les mois à venir ? » etc.
En EM, on privilégiera autant que possible les questions ouvertes, associées à des reflets, qui consistent à renvoyer à la personne ce qu’elle vient de dire pour l’aider à développer l’idée. De cette manière, c’est le discours de la personne qui est au centre de l’échange, et elle est libre d’exprimer ce qui la préoccupe vraiment, ses opinions propres.
Valoriser
« Valoriser, c’est reconnaître explicitement ce qui est bon, en y incluant la valeur inhérente à tout être humain. Valoriser, c’est aussi soutenir et encourager »[ref to=1]. Cette composante importante d’une relation d’aide peut être délicate à mettre en oeuvre sans tomber dans l’écueil du jugement, de l’intervenant se plaçant au dessus de la personne, en position de décider ce qui est bien et ne l’est pas dans ses comportements. Pour éviter cela, la valorisation doit être sincère, authentique. Etre empathique, c’est-à-dire chercher à comprendre au mieux le cadre de référence de la personne, c’est déjà témoigner de l’importance et du respect pour l’autre.
La valorisation favorise l’engagement dans la relation. Lorsqu’une personne se sent écoutée et soutenue dans ses capacités, elle est moins réticente à s’impliquer dans l’échange, plus confiante. Elle reçoit également plus aisément des informations plus difficiles à entendre. Et c’est enfin un moteur vers le changement.
La valorisation émanera souvent de l’intervenant, mais on peut également encourager la personne à reconnaître chez elle ses qualités, ses réussites. D’une manière générale, il faut prendre garde à ce que la valorisation soit bien centrée sur la personne, ses actes, et exprime le moins possible un jugement de l’intervenant. Ainsi on cherchera plutôt à mettre en avant des faits, des actions positives. Quand la personne fait un constat d’échec, on pourra également proposer un autre point de vue, plus positif sur la situation.
L’écoute réflective
L’écoute réflective est la compétence centrale de l’entretien motivationnel. Lorsqu’on écoute une personne, on sait que nos attitudes, nos gestes, ce que l’on nomme le « non-verbal », est très important pour signaler notre intérêt, notre attention à ce qui est dit, et également pour refléter ce qui est dit. Sourire lorsque la personne évoque un fait dont elle est contente est une manière de lui signifier qu’on a entendu ce qu’elle a dit, et qu’on est en empathie avec l’émotion qu’elle ressent.
Au-delà, la notion d’écoute réflective s’intéresse en particulier à ce que le praticien dit, en réponse au discours de la personne qu’il écoute. L’EM visant particulièrement à faire émerger les motivations et capacités intrinsèques, les réponses du praticien doivent permettre l’introspection. Or de ce point de vue, un certain nombre de réponses que l’on donne régulièrement dans un échange constituent des impasses relationnelles [ref to=2], c’est-à-dire des réactions qui empêchent la personne d’explorer plus avant l’idée qu’elle est en train d’évoquer par elle-même. C’est par exemple le cas quand on questionne, conseille, analyse ou cherche à persuader la personne.
Ainsi, on cherchera en EM à refléter verbalement ce qu’a dit la personne par des affirmations (et non des questions). Le reflet peut-être simple (reprendre un mot, une expression, ou reformuler presque à l’identique), ou il peut être plus complexe. Dans ce cas, le praticien propose une reformulation qui ira éventuellement plus loin que le propos de la personne, pour l’aider à poursuivre son introspection. Dans ces reflets, on peut éventuellement exagérer ou minimiser certains propos de la personne pour donner une direction à l’exploration.
Cette aptitude est relativement difficile à maîtriser. Elle nécessite beaucoup de pratique et d’être attentif aux réactions que causent nos reflets.
Résumer
Lorsqu’une personne a énoncé plusieurs idées, lui proposer un résumé de ce qu’elle a dit aura la même fonction que les reflets faits au fil du discours. Cela permet de valider que vous avez bien compris ce qu’elle a souhaité exprimer, et permet à la personne de porter un regard sur ce qu’elle a dit, dans son ensemble, regard qu’elle n’a pas forcément quand elle pense les choses les unes après les autres. Cette vue d’ensemble peut se révéler valorisante, éclairante, ou encore amener des perspectives pour continuer à élaborer, à rechercher des solutions. Ainsi, on pourra envisager différents types de résumés (de rassemblement, de lien, de transition) visant différents objectifs.
Informer et conseiller
Au cours d’un entretien, motivationnel ou non, nous sommes amenés à fournir de l’information, voire des conseils, à la personne. La façon dont on le fait a beaucoup d’importance. En EM, on cherchera en particulier à éviter certains pièges de cet exercice et à mettre en oeuvre certains principes garantissant l’autonomie de la personne. Le premier piège serait de fournir de l’information pour indiquer à la personne qu’elle se trompe sur sa situation par exemple, en espérant ainsi la convaincre d’aller vers un changement de comportement. L’effet obtenu sera inverse, la personne se sentant jugée, incomprise. On peut également faire l’erreur de croire que la personne a peu de connaissances sur le problème, et que c’est notre rôle d’expert de lui en fournir. On s’aperçoit en réalité que les clients ont souvent de bonnes connaissances sur leur situation et les risques liés, et qu’une posture directive et ascendante positionne la personne accompagnée dans un rôle passif, désengagé.
Notes
- [ref id=1]MILLER W.R., ROLLNICK S., L’entretien motivationnel – Aider la personne à engager le changement, trad. par LECALLIER D., MICHAUD P., Paris, InterEditions, 2013, p.69
- [ref id=2]Ibid., p. 53